Alors que la COVID nous afflige encore en ce début de nouvelle année, que la deuxième vague est bien établie et se complexifie avec l’arrivée des variants, le sujet des masques, dont il avait été beaucoup question en 2020, revient en force dans l’actualité.
Nous nous souvenons tous qu’au début de cette pandémie, les autorités de santé publique occidentales affirmaient qu’il était inutile que la population en général porte le masque, puisqu’il qu’il y avait pénurie de masques médicaux, et qu’il n’y avait pas de preuve scientifique démontrant l’efficacité de masques non-médicaux.
À l’été 2020, plusieurs juridictions changeaient leur fusil d’épaule, citant de nouvelles études scientifiques démontrant une certaine efficacité des masques faits à la main (couvre-visage), donc qui n’aggravaient pas la pénurie de masque médicaux. Par exemple, en juillet 2020, le gouvernement du Québec publiait un décret rendant obligatoire le port du couvre-visage dans les lieux publics.
Ce décret s’adressait aux « visiteurs » des lieux publics, et non aux gens qui y travaillent, pour qui le port du masque chirurgical était déjà requis depuis avril 2020. Ce décret, mal interprété par certains, et le fait que les masques chirurgicaux étaient difficiles d’accès en début de pandémie, ont résulté en une situation qui perdure, celle de voir, encore à ce jour, des travailleurs en milieu de travail portant des masques en tissus.
La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité (CNESST) a bien essayé de corriger la situation en publiant une note explicative, plus tard intégrée dans sa Trousse COVID-19, pour préciser que le port du couvre-visage n’était pas acceptable pour les travailleurs, mais il était trop tard; en effet plusieurs entreprises avaient déjà acheté des couvre-visages en tissus, et les avaient distribués à leurs employés, et à l’évidence ces entreprises n’ont pas lu la note explicative sur le site de la CNESST.
Ce n’est pas que dans le milieu du travail et des espaces publics que les directives gouvernementales sur le masque ont pu créer de la confusion mais aussi dans le public en général : À l’automne 2020, lors du retour en classe, certaines juridictions ont imposé le couvre-visage en tissu plutôt que de privilégier le masque de procédure, pour ensuite, au retour des fêtes, changé l’exigence pour les élèves du secondaire, qui doivent maintenant porter le masque chirurgical plutôt que le couvre-visage, alors que ceux du primaire peuvent continuer à porter le masque en tissu.
Il est donc parfaitement compréhensible qu’il subsiste une certaine confusion en ce qui concerne le type de masque acceptable en milieu de travail.
Avec l’arrivée des variants, il est cependant important plus que jamais que le port du masque, malgré qu’il soit au bas de la hiérarchie des contrôles SST, soit tout de même aussi efficace qu’il puisse l’être.
Pour illustrer comment l'utilisation d'un couvre-visage en tissu revient à jouer à la roulette russe en termes d'efficacité de la protection, une étude allemande (Maurer et al., 2020) a évalué l'efficacité de la filtration pour 2,8 μm particules de 16 couvre-visages de différentes marques. Les auteurs ont rapporté une grande variabilité dans l'efficacité de filtration d'une solution saline de marque radio, qui allait de 34,9 % à 88,7 %, contre une efficacité de 99,8 % pour un masque de procédure.
Si votre entreprise fournit ou tolère encore le port du couvre-visage en tissu pour vos travailleurs et/ou vos sous-traitants, c’est le moment, plus que jamais, de remédier à la situation en fournissant des masques chirurgicaux à vos employés, et en demandant à vos sous-traitants de le faire aussi. Ces masques ne doivent pas être un masque qui « ressemble » à un masque chirurgical. En effet, les seuls dont la performance de filtration est garantie, et acceptable par la santé publique pour le milieu de travail, sont ceux portant la marque de leur conformité à la norme ASTM F2100, EN 14683 ou l’équivalent.
Malheureusement ces masques sont jetables, donc une source de matières résiduelles qui remplit les sites d’enfouissement. Le gouvernement du Québec, voulant minimiser l’impact environnemental du port des masques jetables, a demandé au Bureau de normalisation du Québec de définir un standard pour les couvre-visages en tissu afin que ces derniers soient autant efficaces que les masques chirurgicaux. Publié en décembre 2020, le fascicule d’attestation BNQ 1922-900 Masques destinés au milieu de travail sert de référence au programme d’attestation qui permet aux fabricants et aux distributeurs de masques de faire reconnaitre la conformité de leurs produits et aux employeurs, aux travailleurs ainsi qu’aux consommateurs d’identifier rapidement des produits de qualité1. C’est un dossier à suivre puisque les masques conformes à la BNQ 1922-900 sont encore rares sur le marché.
La fin des couvre-visages en tissu?
Aux États-Unis, la mode du port du double masque, « double-masking », popularisée lors de l’assermentation de Joe Biden, durant laquelle les principaux protagonistes portaient tous un double-masque, soit un masque de procédure sous un couvre-visage en tissu, renforcée par l’affirmation du Dr Fauci qu’il est logique que le port du double masque soit plus efficace2, a définitivement changé le sort donné aux couvre-visages en tissu.
Vos couvre-visage en tissus sont définitivement persona non-grata sur vos lieux de travail, auront peut-être une deuxième vie comme couche supplémentaire sur un masque de procédure.
MIS À JOUR LE 24 FÉVRIER 2021
Cela s'est fait assez rapidement : Le 10 février 2021, le CDC publiait une étude portant sur l'ajustement des masques en tissu et des masques de procédures médicales pour une réduction de la transmission du SRAS-CoV-23. Les résultats de cette étude ont démontré que le port d'un masque en tissu sur un masque de procédure médicale améliorait considérablement son efficacité, car bien qu'un masque de procédure médicale ait une grande efficacité de filtration, l'air peut s'infiltrer à quelques endroits. Le port d'un masque en tissu par-dessus un masque chirurgical permet un meilleur ajustement.
Le CDC a vulgarisé le contenu de cette étude pour le public et l'a publiée sur son site Internet. Cliquez ici pour lire l'étude (en anglais). Une bonne lecture non seulement sur la façon de "double-masquer", mais aussi à propos de d'autres alternatives visant à s'assurer que le port du masque est optimisé.
Avec l'avertissement de l'Agence de la santé publique du Canada sur les nouvelles projections de pandémie, incluant les variants préoccupants4, le port du masque doit offrir toute la protection qu'il peut apporter.
Assurez-vous que vos employés et les sous-traitants qui travaillent sur votre lieu de travail portent des masques chirurgicaux et encouragez-les à porter leurs "vieux" masques en tissu par-dessus leur masque chirurgical. Faisons une pierre deux coups : réutilisons ces masques en tissu et augmentons significative de l'ajustement des masques chirurgicaux.
Restez en sécurité, restez en santé, restez bien masqués.
1 : https://bnq.qc.ca/fr/certification/protection-et-surete/masques-destines-aux-milieux-de-travail-c.html
2 : https://www.cnbc.com/2021/01/25/dr-fauci-double-mask-during-covid-makes-common-sense-more-effective.html
3 : https://www.cdc.gov/mmwr/volumes/70/wr/mm7007e1.htm
4 : https://www.canada.ca/content/dam/phac-aspc/documents/services/diseases-maladies/coronavirus-disease-covid-19/epidemiological-economic-research-data/update-covid-19-canada-epidemiology-modelling-20210219-fr.pdf